Dans le Piémont italien : des cols à foison



On adore ce côté du Piémont italien : c'est comme la France mais en un petit peu mieux...  En arrivant de Briançon par le col de Montgenèvre, on descend dans la vallée de la Doire : large et industrieuse elle accueille aussi une autoroute et la sortie du tunnel de Fréjus, et la ligne de train Paris-Milan (en attendant le tunnel Lyon-Turin qui fait couler tant d'encre et de milliards).

A 3 heures de la maison, nous arrivons juste à temps pour boire un capuccino, acheter des gnocchi et des agnolotti, et trouver un endroit où garer le Kangoo qui sera notre 2 pièces pour la nuit : à l'arrière on dort, à l'avant on lit et on mange.

Ce petit chemin dans lequel nous sommes garés pour la nuit débouche sur une forêt incroyablement sombre aux arbres immenses : un endroit complètement désert et paisible où notre véhicule est caché de la route, de quoi passer la première nuit tranquille (on ne pourra pas en dire autant de la deuxième ...)

Réveil à 6 heures : les sommets alentours se parent de soleil orangé. Avant 7 heures, nous sommes sur nos VTT, voiture garée, GPS chargé, 4 litres d'eau, une tonne de sandwichs. A Oulx, stop au café, déjà des cyclistes attablés : les Italiens sont bien plus nombreux à vélo qu'en France ... et toujours sapés comme des pros.

Nous avons du mal à trouver le départ de la piste en S qui monte tout droit vers la Strada Militaria. Le GPS n'est pas d'accord, mieux vaut demander avant de s'engager. C'est un cycliste anglais qui nous confirme que nous sommes bien sur "a hell of a long climb".

C'est parti pour 1200 mètres de dénivelé positif en 10 km, sur un revêtement qui n'est pas si lisse. Des pauses s'imposent, la sueur dégouline. Un 4x4 descend, s'arrête et le conducteur nous propose un verre d'eau gazeuse de sa glacière.

Enfin, nous arrivons sur la fameuse route militaire qui sillonne entre les forts jusqu'à 2800 mètres. Là, le dénivelé ne devrait pas dépasser 8 % pour permettre aux engins motorisés de rouler : c'est comme ça que tous ces kilomètres de routes militaires ont été conçues le long de la frontière.  D'ailleurs ici on retrouve beaucoup de cyclistes qui sont montés par Bardonecchia avec des pourcentages plus cléments.

Il y a aussi beaucoup de 4x4  de toute l'Europe, équipés de monstres poussiéreux et puants qui, vu les nombreux tags "Off road go home", ne sont pas les bienvenus dans ce qui est le plus grand domaine off road ouvert à la circulation d'Europe, nous dit-on.

Les fesses posées dans l'herbe en mangeant nos sandwichs, le  regard fixé sur le sommet d'en face, Mark remarque un autre fort haut perché. Qui dit fort, dit route militaire et sans doute un col ? Vérification sur la carte, c'est bien ça, avec 2 cols en plus... Nous décidons sans hésiter de rester un jour de plus, ce serait dommage de ne pas en profiter puisqu'on est là.
Revenons à notre sortie du jour : le premier col est franchi après 4 heures d'efforts, le Col Basset à 2610m, intersection vers le Colletto à 2660m et le col Vin Vert à 2690 que nous faisons à pied à la montée, faute d'énergie. En chemin, des troupeaux de moutons et des gros patous qui aboient tout intrus, piétons, cycliste ou véhicule. J'ai un secret, je vous le donne : je leur parle, je leur raconte n'importe quoi, qu'ils sont beaux (ce qui est vrai !) et gentils (moins), mais en général ça marche et on me laisse passer.
Edelweiss !

La route s'éloigne ensuite vers un autre massif, et nous roulons en altitude sur des surfaces complètement planes. A l'approche d'un sommet dont la base est dévastée par les avalanches et les meurtrissures de l'écoulement des eaux, se présente à côté du fort Pramand l'entrée du Tunnel Sarraceni : 900 mètres de long en descente, noir comme un four, récemment réouvert après des années de travaux, bien que toujours indiqué fermé.
Pour passer ce massif, il y a un tunnel

On s'équipe d'une lampe frontale, de vêtements plus chauds et imperméables et nous nous engageons l'un derrière l'autre. Le sol est inégal et souvent nappé de grandes flaques d'eau : poser le pied à terre n'est pas une bonne idée. L'eau ruisselle fort des parois du tunnel, pourtant entièrement bétonné. Un virage à 45°, une pente soutenue : je n'aurais pas aimé avoir à le monter en vélo... Enfin la sortie dans le soleil : ouf c'est passé.


Maintenant à nous la descente, non sans avoir en route collecté le col Pramand à 2082 m. Des cailloux et des bosses, une dizaine de kilomètres très rapides si on se laisse emporter. Mais nos nouveaux VTT (Giant Anthem 29) sont impeccables !

Retour à la voiture, et puisque le programme se prolonge demain de façon inopinée et qu'il est pas question de chercher un hôtel à Bardonnecchia (c'est bondé et hors de prix),  il nous faut d'abord une petite rivière au calme pour nous laver, puis acheter du ravitaillement pour le lendemain, et après un verre en terrasse, nous attabler enfin dans un bon restaurant.

Notre deuxième nuit est moins confortable que la première : le Kangoo pour dormir c'est parfait, sauf qu'il faut le vider pour faire de la place et à côté de la voiture, c'est un peu le bordel avec les vélos et toutes nos affaires... Mauvais choix cette fois-ci : nous souhaitons être proches du départ du lendemain pour pouvoir y laisser la voiture, mais c'est trop près des habitations, et jusqu'à minuit nous gardons un oeil sur nos possessions.

Pas de mal à se lever le lendemain, la motivation est là même si la nuit a été courte et tourmentée. Après un petit déjeuner arrosé d'un caffe latte un peu trop blanc, nous voici sur l'itinéraire au départ de Bardonecchia. Qui dit station de ski, dit piste hyper raides : nous avons déjà subi ces dénivelés impossibles à Isola et à Risoul. Il faut pousser le vélo sur du 25 %. Enfin, nous voici sur une incroyable piste qui serpente dans la forêt : le sol terreux est naturellement damé et très lisse ce qui nous permet de rouler tout du long à condition d'être concentré et très régulier.



Récompense sur le Passo del Colomion à 2018m : un magnifique café avec terrasse sur les alpages. Nous reprenons notre progression, cette fois la route militaire devient très étroite, pavé de pierres saillantes : rester sur ses roues et une bataille que je suis très fière d'avoir gagnée jusqu'au fort et au Passo della Mullatiera à 2412 m. Ce sont bien les bâtiments que nous avons vu la veille alors que nous étions juste en face : il y a toujours un col plus loin !


Maintenant, c'est la cerise sur le gâteau : il faut tout redescendre. D'abord sur la piste forestière qui est comme un ruban, puis à partir de Pian del Sol, nous nous mêlons aux VTT downhill, et prenons la piste rouge jusqu'à Bardonecchia. C'est notre première expérience dans un bike park. Il n'y a pas un seul caillou, les virages sont relevés mais je n'ose pas décoller mes roues en  franchissant les bosses, pourtant je descends tout sans m'arrêter !!

Retour à la voiture, nous sommes très très sales de sueur et de poussière accumulée... C'est le CCC dans le Kangoo : pas le Club des Cents Cols, mais le Club des Cents Clochards. Le retour par le col de l'Echelle puis Briançon est bien long sur les routes bondées de la mi-août mais la haute montagne était magnifique dans le Piémont !

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